
Dette publique
verone
14h08 - 1 septembre 2022
Face à la montée des tensions budgétaires dans de nombreux pays africains, le rééchelonnement de la dette apparaît comme une bouée de sauvetage. Il permet aux États de gagner du temps, d’alléger temporairement la pression financière, et d’éviter des défauts de paiement qui seraient lourds de conséquences. Pourtant, cette solution, aussi utile soit-elle dans l’immédiat, ne règle pas les causes profondes du surendettement. Elle ne saurait donc être considérée comme une réponse durable aux défis budgétaires du continent.
Qu’est-ce que le rééchelonnement de la dette ?
Le rééchelonnement consiste à renégocier les conditions de remboursement d’une dette contractée. Cela peut prendre la forme d’un allongement des délais de paiement, d’une baisse des taux d’intérêt, ou d’un moratoire temporaire sur certaines échéances.
Cette démarche peut être initiée dans le cadre d’un accord bilatéral entre un pays et un créancier (comme la Chine ou la France), ou par le biais d’initiatives multilatérales, comme celle menée par le Club de Paris ou plus récemment l’Initiative de suspension du service de la dette (ISSD) lancée par le G20 en réponse à la crise du Covid-19.
Un soulagement à court terme
Le principal avantage du rééchelonnement est l’allègement immédiat de la pression budgétaire. En réduisant les remboursements à court terme, les États peuvent réallouer ces fonds à des dépenses prioritaires, comme la santé, l’éducation ou les subventions sociales.
Pour les pays confrontés à une chute de leurs recettes (notamment les exportateurs de matières premières ou les pays durement touchés par des crises comme la pandémie ou l’instabilité politique), cela représente une bouffée d’oxygène bienvenue
Reporter un problème ne l’efface pas. Il revient plus fort s’il n’est pas résolu..
_Proverbe africain_
Mais une solution de surface
Cependant, le rééchelonnement n’annule pas la dette : il ne fait que décaler le problème dans le temps. Si la structure économique du pays reste inchangée, avec des recettes fiscales faibles, une base productive réduite et une dépendance aux emprunts extérieurs, le risque de revenir à une situation critique quelques années plus tard est élevé.
Pire encore, les rééchelonnements mal négociés peuvent alourdir le coût total de la dette, en ajoutant des intérêts supplémentaires ou en étendant la dépendance vis-à-vis des créanciers.
Des solutions structurelles nécessaires
Le rééchelonnement doit donc être accompagné de réformes économiques profondes : diversification de l’économie, amélioration de la gouvernance budgétaire, lutte contre l’évasion fiscale, efficacité dans les dépenses publiques, et développement de sources de financement internes (impôts, épargne locale, etc.).
Il est également crucial d’adopter une plus grande transparence dans la gestion de la dette, pour éviter les emprunts non soutenables ou mal utilisés. Trop souvent, des projets mal planifiés, peu rentables ou liés à la corruption viennent aggraver les déséquilibres financiers.
La responsabilité partagée
Enfin, la communauté internationale doit également jouer son rôle. Les pays africains doivent pouvoir bénéficier de mécanismes de soutien plus équitables et moins contraignants. Les créanciers privés, souvent absents des discussions multilatérales, doivent être intégrés dans les négociations, faute de quoi toute restructuration reste partielle.
Un nouvel équilibre est à construire : un financement du développement plus juste, plus responsable et moins dépendant de la dette extérieure.
Le rééchelonnement de la dette offre un répit nécessaire, mais il ne doit pas masquer l’urgence de bâtir des économies africaines plus résilientes. Il est temps de passer d’une logique d’endettement à une logique d’investissement stratégique. La dette ne doit plus être un piège, mais un outil au service d’un avenir durable.
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